'faut se lever tôt, 'faut se préparer et prendre un p'tit dej solide pour pas tomber en attendant midi, et déjà, c'est super chiant. J'suis fatigué, je vais pas être en retard donc j'suis pas stressé, mais quelle flemme en vrai ! C'est toujours le matin venu qu'on regrette vite de s'être couché à 3 heure du matin. Ca fait pas longtemps que je suis arrivé, et déjà j'ai l'impression d'être à l'autre bout du monde, dans un tout nouvel univers, mais j'ai pas traversé de portail ou de failles spatio-temporelle pourtant ? Ou peut-être que si ? J'ai rien vu en tout cas, rien à part cette lumière et j'ai cru que j'allais me réveiller la rétine grillée. Bon, je vois encore, j'ai pas de soucis de ce côté là, mais j'ai quand même l'impression qu'il manque quelque chose, pas un truc énorme, juste des trucs par-ci, par-là, mais bon, c'est pas grave, j'ai toute la vie pour y réfléchir, il faut partir maintenant !

L'internat est un peu loin du lycée, et j'ai du faire des pieds et des mains pour avoir un vélo, comme si ça leur coûtait une burne de m'en filer un pour que je puisse circuler convenablement et me rendre au lycée en temps et en heure tous les jours ! Puis aucun effort en plus, le vélo est trop grand pour moi, mais ça fait comme si j'étais plus vieux, donc ça passe, c'est quand même la classe. Je file, donc, direction l'université, parce que ouais, ici, tout le monde est mélangé, trop bizarre. Y'a des grands, des petits, des moyens – comme moi – et y'a les profs aussi, j'espère qu'ils sont sympas d'ailleurs, et que les cours seront intéressants.

Arrivé à l'université, je gare mon vélo à sa place près du grand parking et je file direction le lycée. Je presse un peu le pas parce que j'ai pas envie de me retrouver au milieu de tout le monde à galérer à entendre mon prénom parce que Léo et Gaétan ont décidé de se raconter leurs vacances d'été respectives out loud alors que tout le monde s'en fout. J'arrive près de l'entrée, et fichtre, y'a déjà pas mal de monde, dont des parents mais surtout pas mal d'élèves, ce qui s'apparente à un directeur et un petit groupe de profs ou de surveillants, j'sais pas mais ils ont l'air vieux. Je m'attarde pas dessus, parce qu'il faut que je m'approprie les lieux, que je tente de désigner ce que chaque bloc, chaque bâtiment pourrait potentiellement être. Je vois des numéros sur les blocs, mais aussi sur les portes des blocs. C'est tout gris, y'a zéro couleurs, c'est un peu naze. J'espère que les sièges sont pas trop inconfortables d'ailleurs, parce que passer huit heures assis sur du béton, y'a rien de pire pour mon dos.

Voici venu le temps de faire l'appel et de désigner les classes. Jusqu'ici, rien de très surprenant. Une première classe est appelée, et au final, y'a pas grand monde – 'fin, pas autant que je le pensais, quoi. Autour de moi, les élèves se faufilent à travers les autres lorsque leurs noms et prénoms sont prononcés, et j'espère vraiment que j'vais pas être dans la même classe que ce Théodort, il a l'air très porté sur sa petite personne et il respire la connerie et le rang d'enfant unique chéri de maman et papa. Alors j'attends, j'attends, j'attends encore, et...

« Henderson Dustin ! »

« Han nan, vraiment... » à deux doigts de reprendre mon vélo et repartir à l'internat, faire comme si j'existais pas. Mais 'faut bien, j'aurais qu'à l'ignorer, je m'avance donc en réajustant ma casquette sur ma tête et j'le vois, Théodort, qui attend sagement là, tout sourire, tout blond et bien coiffé. Après, il est peut-être sympa, mais je connais bien ce genre de garçons aux épaules droites, ils ont toute l'attention des filles en général et ils ont toujours des super notes ! Chouchou de la classe en devenir. Bon. Je juge, je juge, mais en attendant, je sens que certains regards me transpercent comme si j'étais une bête de foire ! J'ai peut-être parlé trop fort ? J'sais pas, mais c'est gênant, vraiment gênant. J'fais comme si de rien n'était, je rejoins les élèves de ma classe et je prends une bonne inspiration, préparant mon meilleur regard noir sous la visière de ma casquette.

Dans trois secondes. Trois, deux, un. Je relève la tête d'un coup sec, ma casquette s'envole vers l'arrière et je fusille du regard l'être supérieur qui me dévisage. L'analyse prend un certain temps. Des cheveux longs et bouclés, un visage qui m'est très, trop familier, un style vestimentaire que j'connais bien. MAIS, C'EST...

C'est une dizaine de secondes qui passent, pas moins, et mes yeux deviennent ronds, ma mâchoire s'ouvre comme si je venais de mettre la main sur un trésor perdu depuis des millénaires. Je ramasse même pas ma casquette, j'suis trop content, mais j'ai aussi envie d'pleurer sur le coup parce que j'pensais être tout seul ici ! 'fin, j'pensais, si ça s'trouve c'est même pas lui ? Mais si, c'est lui, c'est Eddie, Eddie Munson !

« Oh bord... » j'finis pas, j'le dis pas trop fort non plus parce que je vais me faire taper sur les doigts si non, mais j'ai envie de crier super fort là. Je peine à rester en place, parce que si c'est bien lui, j'ai trop de choses à lui dire, à lui raconter ! Et ouais, encore une fois, j'ai envie d'pleurer parce que j'suis un gamin perturbé qui a perdu tous ses potes en arrivant ici et qui s'en est pas encore fait. 'puis c'est la rentrée, 'faut que je reste focus, mais bordel, ce monde est tout petit.

Pincez moi, je rêve ! Si à mon arrivée on m'avait dit que j'finirais par croiser quelqu'un que je connaissais, je l'aurais pas cru ! Mais alors, que je croise quelqu'un, c'était bien, mais que je croise Eddie, alors là...! Ca avait pas l'air d'être le bon moment, c'était jamais le bon moment ici, mais j'm'en fichais, Eddie était là et c'était tout ce qui comptait.

Il s'approchait de moi comme une fusée, et en un rien de temps je me suis retrouvé emprisonné dans ses bras, à deux doigts d'étouffer. J'étais trop content, tant pis si j'arrivais plus à respirer ! Ca paraissait presque pas réel tellement c'était trop.... Beau ? J'aimais pas être trop sentimental comme ça, mais qui ne le serait pas en retrouvant un membre de sa famille ? J'étais à deux doigts de chialer, pourquoi ? J'savais pas trop, mais j'étais en proie à une tristesse que j'arrivais pas à saisir. Je mettais ça sur le coup de l'émotion des retrouvailles, parce que ça y ressemblait vachement quand même !

Il relâchait un peu son étreinte et j'avais enfin l'occasion de le regarder : il avait pas grandi, même pas avec ses cheveux attachés un peu relevés là. Bhahah, j'étais à deux doigts de le dépasser, en vrai ! Deux ou trois ans de plus et il était minuscule à côté de moi j'suis sûr ! Je souriais comme un gros débile, j'avais le cœur un peu serré aussi, et ce Putain mec, t'étais où ? suivi de son petit Je t'attends depuis une éternité des familles, ça pinçait fort dans le thorax. Bhouh, c'était dur de pas se laisser emporter par l'angoisse que ces mots portaient. J'avais peur de cligner des yeux et de disparaître maintenant, j'voulais pas qu'il soit seul et j'voulais pas entendre ça encore une fois, j'voulais pas, non.

« Beh, eh ! J'étais l'internat, pardi ! » c'était une évidence pour moi, mais pas forcément pour lui, ceci-dit. Je savais plus trop ce que je faisais au moment où la lumière est apparue pour me lâcher sur cette île, mais j'avais pas pu trop bouger de l'internat depuis. « J'ai l'impression que ça fait mille ans que j't'ai pas vu ! Tes cheveux ont poussé ? Moi aussi je les laisse pousser, t'as vu ? » je tirait une petite mèche pour la détendre et lui montrer fièrement.

Maintenant que je l'avais en face de moi, j'avais plus du tout envie de commencer cette rentrée (de base, j'avais pas envie, mais c'était la dure loi de la jungle à Staten Island aussi les cours). J'avais juste hâte de finir cette journée, de pouvoir lui raconter comment j'avais atterri ici, de lui proposer des plans fous à base d'idées plus foireuses les unes que les autres.

J'me sentais pas très à l'aise ici, j'avais l'impression que tout était trop différent d'Hawkins (c'était le cas, rien qu'à en voir à quel point la technologie était avancée), mais... Mais je me rendais petit à petit compte que finalement, j'étais pas seul, que dans tous les cas j'aurais quelqu'un vers qui me tourner et pour n'importe quoi ! C'était pas n'importe qui, en plus, c'était Eddie, Eddie Munson, mon copain préféré, le boss de D&D et surtout, le grand frère que j'ai jamais eu.

Je calais ma main contre ma joue comme pour cacher ma bouche, et je murmurais.

« J'espère que la journée va pas s'éterniser ! J'crois qu'on a plein de trucs à se raconter ! »

Eh, c'était quand même sacrément bizarre d'être face à Munson à Staten Island - même pas à Hawkins quoi ! -. J'avais l'impression d'être dans un tout autre univers carrément, et il était totalement cool cet univers en vrai, parce que j'étais pas tout seul, en fait, rendez vous compte ! Je me suis cru solo pendant un moment, j'ai même cru que j'allais finir mes jours tout seul ici, sans un seul de mes potes d'Hawkins pour pouvoir parler et paraitre sociable sans me forcer, mais en fait non ! Merci cette fichue rentrée de me permettre d'être content pour une fois, de pas m'autoriser à me plaindre que cette ville est pourrie et que tout a l'air plus compliqué.

Je regardais Eddie et il était content, alors moi aussi j'étais content, et j'étais super fier qu'il trouve que mes cheveux un peu plus longs, ça faisait très métal.

- Hehe, merci Eddie !! je répondais, tout sourire aux lèvres. Je le regardais ensuite, relevant mes sourcils en empruntant un faux air surpris. Heh, devine quoi ? J'savais pas non plus que t'étais là ! Et en vrai, j'pensais pas croiser qui que ce soit ici, c'est fou quand même !

Et puis ça se mettait à brailler non loin de nous. Je laissais filer mon regard vers cette voix qui nous dérangeait clairement. Ohlala, on avait plus le droit de retrouver nos amis tranquillement de nos jours, à croire qu'une rentrée était plus importante que les potes... Mouais en fait, ça l'était. Bon... Fallait bien que j'aille bosser quand même, non ? Yes, bah j'étais déjà trop pressé que cette journée passe, et quand Eddie s'éloignait, dramatique qu'il était, je tendais mes bras vers lui pour appuyer cette fausse scène presque tragique.

- Promis, je t'y rejoindrais ! je lui répondais, ne pouvant retenir un léger rire alors que lui même perdait son petit rôle improvisé. Avant de filer avec ma nouvelle classe, je me penchais pour ramasser ma casquette, puis je filais vers cette satanée journée de rentrée, plus ou moins motivé.

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Dernière sonnerie, toute.dernière.sonnerie. Enfin ! J'avais même pas trainé à la fin de ce dernier cours (qui n'en avait même pas été un en vrai, comme les "cours" du tout premier jour de la rentrée, en vrai.). J'étais tellement pressé de retrouver Eddie que j'ai pensé qu'à ça toute la journée. J'avais même pas pensé à manger à midi en vrai, j'ai préféré noter des trucs sur mon cahier, des trucs que je voulais lui demander, parce que je pensais avoir compris qu'il connaissait certainement mieux le coin que moi, simple déduction par rapport au peu qu'il m'avait partagé ce matin.

J'avais tout bien rangé dans mon sac de cours, j'avais enfilé ma casquette et j'étais sorti de ma salle de cours pour rejoindre la vie scolaire, comme il m'avait dit, Eddie. J'étais super pressé de le retrouver, si bien que j'en courais presque dans les couloirs, presque... C'était interdit.

Il m'avait fallu quelques minutes pour enfin apercevoir mon ami adossé contre son mur, et wow, quelle classe, comme toujours !

- Eddie ! je criais en slalomant entre les élèves qui se marchaient presque dessus, la main levée vers le haut que j'agitais au dessus de ma tête. Je le rejoignais finalement en trottinant - toujours dans l'idée de ne pas courir parce que c'était toujours interdit, hein.

- C'était loooooong ! J'ai cru que le temps avançait plus à un moment ! Puis j'comprends rien à mon emploi du temps ! J'imagine que je vais finir par m'y faire mais ça change quand même pas mal d'Hawkins ! j'enchainais, tout en regardant Eddie. Et du coup, j'ai compris qu'au cours de la journée mais... Tu bosses ici, en fait ? C'est fou ! T'es un surveillant c'est ça ? J't'ai pas vu dans la liste des profs ! Ca aurait été cool que tu sois prof' genre... Prof' de jeux de stratégie ! Prof' de stratégie même, cette classe !

Ohlala, j'avais juste envie de lui parler sans m'arrêter. J'avais trop de choses à lui dire, trop de choses à lui demander. Je voulais parler de tout et rien avec lui, juste papoter aussi, c'était bien ça, non ? Allez, respire Dustin, laisse le parler aussi, mais... Et si c'était juste mon imagination, tout ça ? Si ça se trouve je parle juste au mur qu'il y a derrière lui, et il est peut-être même pas là en fait ? Quand même ! Je tends ma main vers lui et je viens pincer son bras, fichtre, il était bien là. Je relevais les yeux vers lui, un petit sourire désolé aux lèvres.

- Oups, pardon ! Je vérifiais si t'avais pris du muscle !

J'avoue ne pas avoir été super malin de le pincer et de trouver comme excuse une prise de muscle soudaine de sa part, mais j'devais être sûr qu'il était bien là, alors comment j'aurais pu faire autrement ? Lui mettre une baffe ? J'étais mort si je faisais ça, puis ça ne me ressemblait pas du tout, alors bon. Mais c'était drôle de le voir tout à coup hanté par la perplexité, et j'haussais légèrement les épaules, un petit sourire rusé aux lèvres.

- Bah, t'aurais pu avoir un déclic, puis c'est bien les muscles pour transporter des trucs lourds ! je lui disais, continuant sur ma petite lancée de cette excuse à peine bien trouvée.

La main d'Eddie s'abattait sur ma casquette qui s'enfonçait sur ma tête, puis je relevais la main pour relever l'avant, grommelant légèrement avant de l'écouter attentivement. J'avais pas mangé, et je pouvais dire que je crevais la dalle, alors un petit McDo, c'était pas de refus.

- 'Faut que tu me paies à manger, ça creuse le lycée, et j'ai bossé dur aujourd'hui !

C'était pas vrai, j'avais rien fichu de spécial qui soit capable de m'épuiser au point de compter sur les dix doigts de ma main le temps qu'il me restait à vivre, mais j'allais pas refuser une invitation aussi belle de, de un : passer du temps avec mon cher Eddie, de deux : le laisser payer pour moi. De toutes façons, j'avais pas de petites économies, ou du moins, pas assez d'argent de poche pour pouvoir faire des folies pour l'instant. Alors je le suivais jusqu'à l'extérieur de l'établissement.

Sur le chemin pour rejoindre le parking à vélos, les petites remarques de mon grand frère me faisaient sourire, voire même rire quelques fois. Je n'avais aucun mal à l'imaginer en prof', un prof' qui en aurait pas grand chose à faire de savoir si ses élèves étaient attentifs ou non. Ca aurait été le feu quand même, puis j'aurais été son chouchou en plus, j'suis sûr.

- Ouais mais... Ca aurait été cool les cours avec toi en vrai ! Tu m'aurais nommé sous-chef de la classe et on aurait pu genre... Regarder des films ou jouer à Donjons et Dragons pendant les heures de cours, t'imagine ? moi, j'imaginais très bien, mais c'était tout aussi bien de l'avoir comme surveillant, car au moins, j'étais certain d'avoir quelqu'un à qui parler si jamais j'en avais besoin au cours de l'année.

J'étais aussi rassuré sur le fait que j'allais me faire à toutes ces nouveautés vis à vis de l'emploi du temps qui m'avait été donné. J'espérais quand même avoir un peu de temps pour moi, en dehors des cours, parce que même si j'avais pas perdu l'habitude d'étudier, j'avais pas non plus envie de passer ma vie enfermé dans une salle de cours.

Je détachais la sécurité de mon vélo avant de la mettre dans mon sac, puis je posais mes mains sur le guidon pour le tirer de son emplacement avant de grimper sur la selle, réajustant mon sac sur mes épaules. Enfin, à la question d'Eddie, je relevais la tête vers lui, faisant mine de réfléchir en grattouillant mon menton du bout de mon index.

- Ouhla ! J'suis arrivé le... Deux septembre il me semble ! Ca fait vraiment pas longtemps, je pensais avoir plus de temps pour me reposer et me faire à tout ça sans devoir me presser à devoir faire comme si tout était normal, et tout. Je lui répondais, grimaçant quelque peu avant de poser un pied sur la pédale de mon vélo pour prendre de l'élan et quitter le petit parking. Je roulais alors à côté de Eddie, continuant la conversation que nous avions juste avant.

- 'fin, j'pensais pas, quand même, que je me retrouverais tout seul ici au début. J'ai cru à une nouvelle faille à Hawkins, mais y'a rien ici à part... Bah rien du coup ? Je le regardais, un peu perdu tout de même.

En réalité, même si Mike, Lucas, Onze, Max, Will et Suzie me manquaient, j'étais plus qu'heureux qu'Eddie soit là, avec moi. Il était clairement celui que j'aurais cherché en premier si j'avais eu le temps de le faire, mais il était là, alors j'avais même plus à m'inquiéter de quoi que ce soit maintenant.

- Et toi alors ? T'es arrivé quand ici ? T'as... Croisé des gens qu'on connait ou pas du tout ? je finissais par lui demander, un brin d'espoir sur le conscience.

J’étais assez curieux quant à ce que cette île pouvait cacher derrière le calme qu’elle prétendait montrer. Je n’avais rien connu d’autre qu’Hawkins, ou peut être le camp de vacances, mais ça s’arrêtait là. C’était un peu bizarre de me retrouver ici sans personne (ou presque maintenant), et dans ma petite tête, certaines choses paraissaient tellement lointaines que je n’arrivais pas à mettre des mots dessus, comme si ça ne voulait juste pas venir. Ça me contrariait un peu, j’avais l’impression de rater des choses et bordel, comme c’était pénible ! Mais bon, j’avais quand même fini par retrouver Munson, et franchement, ça pouvait pas être mieux.

Apprendre que ça faisait plus d’un an qu’il était là me choquait un peu. Mon visage partageait l’effet de surprise que la nouvelle me faisait, et je le regardais avec de grands yeux, presque choqué.

- Un an ?! je beuglais, l'expression choquée de mon visage n'étant absolument pas exagérée. Tu m’étonnes que tu aies trouvé le temps long, c’est dingue ça !

Je me demandais pourquoi est-ce qu’il m’avait autant manqué, mais maintenant j’avais la réponse. Un an qu’il était ici, Eddie, une année qu’il avait passée ici sans moi, le pauvre teh ! Mais tout à coup, ça me faisait réaliser quelque chose qui me turlupinait depuis un moment (enfin, c’est ce que je croyais). J’étais toujours perché sur mon vélo, direction le McDo, et je tournais la tête vers Eddie pour le regarder, à défaut de regarder la route.

- C’est pour ça que j’ai l’impression de pas t’avoir vu depuis une éternité ! je lui disais, comme si tout devenait clair dans ma petite tête. Ça explique tout ! T’étais sur cette île en fait !

Eddie mettait bien du suspense quant aux personnes qu’il avait pu croiser ici. En plus, selon lui, c’était Bizarre et Improbable, y’avait de quoi être curieux. Et pourtant, il n’en disait pas plus, alors une petite mine légèrement contrariée au visage, je reposais mes yeux sur la route, mon visage s’adoucissant finalement quand il m’explique qu’il me raconterait tout quand on sera posés, alors j’étais content.

- Les autres ? Non, j’ai vraiment croisé personne, même pas à l’internat ! je lui disais alors, haussant un peu les épaules tout en laissant un petit soupire m’échapper, et j'ajoutais : Si ça se trouve, nous on est coincés ici, et eux ils sont coincés ailleurs, dans un autre univers complètement pommé !

C’était plus que théorique, mais j’avais vu tellement de trucs bizarres dans ma vie que ça ne me surprendrait même pas si c’était le cas. Je serais presque tenté de chercher un moyen de les contacter, parce que je l’avais déjà fait et que ça avait marché, enfin… Je crois ? Bref, un jour ou l’autre, on aurait la réponse à toutes nos questions de toutes façons, ça, je l’espérais fort.

Après quelques derniers coups de pédales, nous arrivons sur le parking du fast-food. Je stationne mon vélo avant d’ajouter la petite sécurité, puis je me redresse pour regarder tout autour de moi, remarquant le parking presque vide.

- Ça devrait aller vite, y’a pratiquement personne aujourd’hui ! je regardais alors Eddie, un air interrogateur au visage pendant que nous nous dirigeons vers l’entrée du fast-food. C’est toujours comme ça ?