Une consultation. Tout d’abord, cela t’a surpris. Tu ne t’attendais pas à ce qu’on fasse appel à ton expertise pour une enquête policière. Ici, tu es un simple professeur de droit pénal. Tu n’es plus le Juge Suprême que tu as toujours été depuis ton implication dans l’histoire de Fontaine (dans l’histoire de ton peuple). Ici, dans cette ville, dans cet univers, tu es enseignant. Tu apprends les lois à des étudiants et les guides à travers leur complexité. Tu te demandes donc pourquoi Monsieur Hargreaves a souhaité avoir ton avis. Bien sûr, il te semblait déplacé de décliner sa demande. Tu as donc accepté pour cette raison (et par curiosité). En effet, tu es curieux. Tu aimerais connaître les motivations de cet inspecteur et savoir où ces recherches pourraient vous mener.

Le Gates of Lust, un nom ambigu pour un établissement convenable. Tu supposes cependant que le choix d’une appellation varie en fonction des personnalités de chacun, que ce qui paraît inapproprié pour certains sera amusant, voire plaisant, pour d’autres. Ainsi va la complexité de l’humanité. Il n’y a jamais de règle concernant la subjectivité, et c’est bien pourquoi tu as parfois tant de mal à comprendre les êtres humains (et à te comprendre toi-même). Avant de te présenter au rendez-vous fixé par l’inspecteur Hargreaves, tu as tenu à te renseigner sur l’établissement. De prime abord, il s’agit d’un endroit tout à fait correct. Tu ne t’y serais jamais rendu de toi-même, mais tu conçois que d’autres personnes souhaitent y passer un moment agréable. L’établissement est chic et bien entretenu, en surface impeccable. Mais c’est justement pour la partie immergée que l’on t’a demandé de l’aide, n’est-ce pas ? D’après les documents que tu as pu trouver en accès libre, tout est en ordre. Les signatures adéquates sont présentes et les termes sont clairs. Il y a bien certains mots ambigus, sur lesquels il serait facile de jouer, mais aucune preuve tangible pour pointer du doigt de potentielles activités illicites.

Sans doute l’inspecteur Hargreaves pourra-t-il t’en dire davantage, lors de votre entrevue.

A l’heure pile, tu te présentes au commissariat et l’on te demande de patienter. Tu t’assois donc sur une chaise et observes ton environnement. Les lieux sont assez calmes, loin de l’idée que tu t’en faisais. N’étant jamais entré dans un endroit comme celui-ci, tu ne savais pas vraiment à quoi t’attendre et tu n’as pu que spéculer. La réalité est souvent très éloignée de l’imagination. Finalement, après plusieurs minutes, un homme apparaît en bas des escaliers qui faisaient face à l’accueil. Puisqu’il s’avance droit dans ta direction, tu discernes sa plaque et te lèves à ton tour. Il s’agit de l’inspecteur Hargreaves. Tu lui tends une main courtoise, car ainsi le veut la coutume du monde humain lorsque deux personnes se rencontrent et se saluent. Tu notes aussitôt l’air fatigué, peut-être même abattu, de ton nouvel interlocuteur. Tu n’as jamais été doué pour discerner les émotions humaines mais tu sais malgré tout reconnaître un homme éreinté lorsque tu en vois un. Tu te présentes formellement, de ta voix à la fois ferme et calme :

« Je suis Monsieur Neuvillette, enchanté de vous rencontrer de visu. Je crois ne pas me tromper en supposant que vous êtes l’inspecteur Hargreaves. » De fait, tu ne poses pas de question, tu affirmes. Libre à lui de te corriger, bien évidemment, tu ne t’en vexeras pas, au contraire - on apprend de ses erreurs pour ne plus les commettre ensuite. « Puis-je vous demander un verre d’eau avant que nous ne commencions ? » Car l’eau, ta boisson favorite, te permet toujours de mieux réfléchir. Et tu imagines que cet inspecteur aurait bien besoin d'une courte pause avant de reprendre le dossier.

MADE BY @ICE AND FIRE.

Les plaintes contre le Gates of Lust ne sont pas rares, de ce que tu as compris. Des personnes qui se retrouvent subitement sans rien dans les poches après avoir passé une simple soirée dans cet établissement. Mais y pratique-t-on vraiment des activités illégales malgré l’ambiguïté des documents que tu as trouvé à propos de cet endroit ? Les pauvres malheureux victimes d’escroqueries ne se sont-ils pas mis dans l’embarras d’eux-même ? Tu as bien peur que ce soit là un contre-argument employé, juridiquement valable si la tromperie s’avère légale. C’est précisément la raison de ta présence ici, et probablement celle de la fatigue de l’inspecteur Hargreeves. Tu suis ce dernier dans l’escalier alors que tu lui demandes un verre d’eau, ce à quoi sa réaction de surprise t’étonne quelque peu. N’est-ce pas une boisson nécessaire à la vie, après tout ? Pourquoi est-on toujours si étonné de te voir boire de l’eau plutôt que du café ? C’est, pour toi, un mystère qui demeure complet - mais comme l’inspecteur ne fait pas de commentaire, tu t’abstiens d’en faire un à ton tour. Le débat ne vaut pas la peine d’être mis sur le tapis, et tu conçois que les êtres humains ne parviennent pas toujours à distinguer les nuances de goût que l’eau peut avoir en fonction de sa provenance.

Vous arrivez devant la fameuse fontaine à eau une fois que ton interlocuteur eut terminé ses explications quant au fonctionnement pratique de votre collaboration. Ce à quoi tu as hoché la tête, un air sérieux sur le visage, alors que tu prenais mentalement note des informations. Si l’inspecteur Hargreeves choisit quelque chose sur le distributeur juste à côté, tu optes pour un verre d’eau fraîche qui coule dans un gobelet cartonné que tu tiens dans une de tes mains.

« En effet, j’en ai étudié les détails avec attention avant de me présenter à notre rendez-vous. » lui expliques-tu de ton habituelle voix neutre et posée. Tu te tournes légèrement vers lui, ton verre à la main, en attendant que sa boisson soit prête. « Je dois admettre que les papiers de cet établissement sont en règle et entrent en corrélation avec les lois érigées dans cette ville. Du moins, de prime abord … »

Tu n’as jamais mené personnellement l’enquête qu’une seule fois, lorsque la vie d’une de tes mélusines a été menacée. Un Juge étudie des dossiers et porte un verdict en fonction de faits qui lui sont présentés et des lois en vigueur. Tu étais connu pour ton impartialité sans faille. Ici, tu n’es qu’un professeur de droit pénal à qui un inspecteur de police demande une consultation juridique. Tu lui fourniras donc toutes les explications nécessaires ainsi que des conseils avisés si tu le peux. Tu connais les règles et les lois de Staten Island par cœur, les ayant toutes apprises lorsque tu n’avais encore aucun souvenir de ta véritable identité, tu espères donc pouvoir te rendre utile en matière de justice.

« Il y a une certaine ambiguïté dans les termes pré-établis lors de la création de l’entreprise, mais les lois aux Etats-Unis sont assez floues, en termes d’administration. » Tu secoues légèrement la tête, l’air désapprobateur. Lorsque tu songes au fonctionnement de Fontaine et aux divers formulaires à remplir afin de développer un commerce et créer une entreprise, tu trouves ici le fonctionnement particulièrement souple. « Il peut y avoir eu un vice de procédure mais il n’y en a aucune preuve concrète dans les documents qui m’ont été transmis, ce n’est qu’une spéculation.  Là où je m’interroge, c’est par rapport au droit du travail. Les lois aux Etats-Unis sont très strictes à ce propos. Et je me demande si tous les employés sont correctement déclarés pour ce qu’ils y font réellement, si toutes les polices d’assurances ont été mises en place, si les enregistrements auprès de l’administration fiscale ont bien été faits, également. Pensez-vous pouvoir vérifier cela ? Ce serait un point de départ important si vous souhaitez monter un dossier et rassembler des preuves contre l’établissement. »

Tu prends une petite gorgée de ton eau dont le goût est très fade, malheureusement. Il fallait s’y attendre, mais tu t’en contenteras.  

« Quant au patron, ce monsieur Ancunín, je n’ai rien vu d’illégal le concernant dans son dossier. Que cherchez-vous précisément, sur cet homme ? Sur quel aspect menez-vous votre enquête, si je peux me permettre de vous le demander ? »

MADE BY @ICE AND FIRE.

D’un pas assuré, tu suis l’inspecteur jusqu’à son bureau où vous prenez place l’un en face de l’autre une fois la porte refermée derrière vous. L’endroit est plus petit que tu ne l’avais imaginé - mais l’imagination est ainsi faite, la réalité en est toujours très éloignée. Tu croises les jambes et poses un regard sur quelques meubles mais, surtout, sur les piles de documents qui encombrent le bureau. A cela, tu ne peux qu’avoir un sentiment de familiarité ; ton propre bureau est lui-même noyé des différents papiers administratifs que tu prends soin, tous les soirs, de ranger dans de larges tiroirs par ordre alphabétique. Tu prends une gorgée d’eau rafraîchissante (quoiqu’au goût, ma foi, bien fade) avant de déposer ton gobelet devant toi et de joindre tes mains entre elles sur tes jambes croisées.

« Je vois, » ponctues-tu la déclaration de l’inspecteur. Il n’y a donc rien d’illégal, de prime abord. Et si le désir de l’inspecteur est de trouver une aiguille dans une meule de foin, tu ne vois qu’une seule solution viable pour faire corréler les plaintes des clients : se rendre sur place. Tu ne mènes jamais d’enquête de terrain, ce n’est pas là le rôle de Juge Suprême qui t'avait été octroyé ; ici, tu es un peu curieux de savoir comment les choses se déroulent. Tu ne peux malgré tout rien suggérer de tel, en tant que consultant. « Il semble en effet être difficile de recevoir des informations tangibles sur les faits se contredisent ainsi. » confirmes-tu en penchant légèrement la tête sur le côté. Au tribunal de Fontaine, avec aussi de preuves, aussi peu de témoins, monsieur Ancunín aurait été reconnu non-coupable. Or, vous n’êtes ni à Fontaine ni à la Cour, et la façon de fonctionner est différente. Il reste donc quelques chances pour obtenir de nouvelles preuves.

« Je ne pourrai guère trouver ce qui est effacé, encore moins ce qui est introuvable, inspecteur. » dis-tu de ta voix neutre et profonde. « Mais je peux toutefois vous faire une suggestion, ou vous donner un conseil en plus des documents que j’ai apportés pour compléter vos rapports. Je viens d’un pays appelé Fontaine, nation de la Justice ; nous avions pour habitude de mener des enquêtes très étroites lorsque des activités illicites et illégales étaient déclarées, ou lorsque des plaintes étaient déposées. Je me souviens d’une affaire similaire en quelques points à la vôtre, au sein d’un établissement où se pariait de l’argent. L’équivalent de ce que vous appelez agent se sont alors rendus sur place pour enquêter en tant que clients, afin de comprendre le fonctionnement d’un tel endroit, d’y mener une enquête sans être soumis à un mandat de perquisition ; en tant que simples consommateurs, cela est inutile, n’est-ce pas ? Bien que cette façon de faire flirte avec les limites de la loi, c’est une activité qui demeure légale. »

Tu reprends une gorgée de ton eau. Tu ne sais pas si c’est une idée à laquelle l’inspecteur Hargreeves a déjà songé. Étant donné son enquête minutieuse, tu supposes que oui. S’il ne l’a pas encore réalisé, c’est peut-être qu’il manquait de temps, d’effectif, ou tout simplement de preuves pour savoir comment enquêter sur place. Tu ne saurais dire avec exactitude.

« Peut-être y avez vous déjà songé, et si tel est le cas, ma proposition ne fera guère avancer votre affaire, je le crains. »

MADE BY @ICE AND FIRE.